Un mouchoir en papier

Négligemment jeté

Sur la voie lactée

Un mouchoir en papier

Froissé, déchiré

Sur le bord de la jetée

Un mouchoir en papier…

Encore me direz-vous ?

C'est que sur notre planète

Tant et tant de morceaux de vie

Enveloppés discrètement

Dans ces petits mouchoirs blancs

Racontent leur histoire

Je disais donc :

Un mouchoir en papier

Emporté par la brise glacée

Vers un carreau cassé

Un mouchoir en papier

Tout plié

Dans le fond d'une poche trouée

Mais où voulez vous en venir ?

Chut !

Lisez donc la suite…

Un mouchoir en papier

Plissé, ridé

Dans un sac plastifié

Un mouchoir en papier

Tout mouillé

Dans l'eau salée

Des petits mots noircis

Dans les replis

D'un mouchoir flétri

De l'Amour,

Du chagrin,

De l'amer,

De la joie,

Des pleurs,

Des plaies,

De la fièvre,

Pensez vous que cela n'est rien ?

Sonia

A ma Grand-Mère

Douces joues

Piquées de grains fous,

Peau de lait

Velours,

Se blottir dans ton giron.

Pétillante !

Bonbon acidulé.

Tu savais bien compter

Les enfants, les années.

Jamais tu ne perdais

Le fil de ton tricot.

Moelleuse rousse

Caramel et lait

Ronde et tendre

Je veux juste te dire :

Je t’aime.

Sur ta tombe inondée

De perles de rosée,

Le reflet du passé

Tes joues pâles fardées.

La rondeur d'une larme

Sait jouer de ses charmes

Et la mélancolie

A des parfums de pluie.

Mes cheveux en rideau

Et mon cœur en lambeaux

Dévoile la douleur

Qui me brûle en cette heure.

Tendrement je dépose

Sur la pierre une rose.

Sonia

Un vieux papier froissé au fond de la corbeille

D'où jaillissent des cris qui vrillent mes oreilles,

De ses plis insensés s'écoule une encre rouge

Frissons incontrôlés, autour plus rien ne bouge.

Stopper ces hurlements qui me glacent les sangs,

Les grincements aigus qui percent mes entrailles

Et abîment mon cœur d'une profonde entaille.

Ne plus voir tous ces corps couverts d'un voile blanc,

Effacer l'incarnat qui couvre mon regard

Quand la chute du jour envahit ton retard.

Tant de bourgeons fanés dans ces papiers froissés,

Tant d'Amours dévastés, de désarticulés,

Membres éparpillés sur les chaussées rougies,

Sous les tôles froissées, d'infinies léthargies.

Sonia